Le 23 Décembre 2018, par Etienne Deketele-Kestens
Pour ce nouvel opus de l'Instant Méca, nous allons parler d'un récent système antipollution. Créée pour les moteurs diesel, l'injection d'AdBlue dans l'échappement permet de réduire drastiquement le taux d'oxydes d'azote (NOx) rejeté par les moteurs au gazole. Mais, alors, comment cela fonctionne-t-il ? Notre quatrième mission est de découdre son principe !
La principale différence entre un moteur à essence et un moteur diesel est la manière avec laquelle le carburant est brûlé. Retenez bien cela : le moteur essence est un moteur à explosion, le moteur diesel est un moteur à combustion. Concentrons-nous maintenant sur les moteurs au "fioul", en voyant que la température maximale atteinte dans les cylindres pendant l’inflammation du carburant est de l'ordre des 400°C. Pour atteindre cette température, le système d'injection directe est favorisé, avec l'apport de bougies de préchauffages et autres artifices. Évidemment, cela donne des avantages, mais aussi des inconvénients.
Dans les inconvénients qui nous intéressent, ce sont les émissions d'oxydes d'azote. Ils ne sont pas spécialement dû au diesel, mais bien à sa température d'échauffement. L'azote, présent à 78% dans l'air, se retrouve dans le mélange air-carburant. Les moteurs au gazole fonctionnant à "excès d'air", il y a donc beaucoup d'air (et donc d'azote) présent dans les chambres de combustion. MAIS, comme les températures grimpent énormément, l'azote (nécessaire pour nos poumons) va se transformer en dioxyde d'azote. Dans cette solution de NOx, il y a 90% de NO (inoffensif), et 10% de NO2 (plus toxiques). Le problème est que les catalyseurs (et filtres à particules) vont mélanger ces solutions.
Il y a de cela bientôt 8 ans (en 2011), une nouvelle norme antipollution a fait son apparition. Elle s'appelle Euro 5, et succède logiquement à l'Euro 4. Voulues à 5 mg/km, les émissions de particules fines des moteurs diesel devaient être bien mieux traitées qu'avec la norme précédente. En effet, il en faut 5 fois moins que les Euro 4, et même 28 fois moins que la norme Euro 1. Pour cela, il a fallu ajouter le fameux filtre à particules (FAP). Le gros problème, c'est que ces nouveaux systèmes de filtrations avaient pour cause d'augmenter très fortement le taux de NOx émis en conditions réelles, comme nous le montre ce graphique ci-dessous. C'est tout à fait logique, au final. Le FAP mélange les NO et les NO2, ce qui forme les NOx, qui seront à 100% toxiques (même si ce n'est pas un grand poison).
Depuis 2014, chaque nouveau moteur doit être homologué en Euro 6. Cette norme a déjà subit deux mise à jour, et sera sévèrisée en 2020. Elle a pour but principal de réduire les émissions de NOx. Du coup, chaque constructeur y va de son grain de sel pour tenter de limiter la casse, avec toujours plus ou moins de succès. Outre le "piège à NOx", utilisé entre autres par Renault, ne garantissant pas le rendement demandé pour les futures normes, la sélection catalytique semble être la meilleure solution. Le SCR (Selective Catalytic Reduction en anglais) est utilisé par bon nombres de constructeurs, avec plus ou moins (encore une fois) de brio pour ce qui est de l'efficacité.
L'AdBlue n'est pas bleu, mais bien transparent. Beaucoup disent de lui qu'il est aussi inodore, mais cela n'est pas vrai. Son autre nom est l'urée, parce qu'il est composé de 30% d'ammoniac et de 70% d'eau. Du coup, il a une assez forte odeur d'urine. Il se place dans un réservoir séparé (entre 15 et 20 litres de volume). L'AdBlue va donc être injecté dans le filtre SCR pour (essayer de) réduire à au moins 90% les NOx. Ce n'est pas toujours un succès, à cause de la température que doit atteindre la solution pour se révéler efficace. En effet, il faut que l'AdBlue monte à 190°C pour se transformer en ammoniac pur, pour enfin transformer les oxydes d'azote en azote inoffensif, et en eau ! Le principe parait génial, mais il a rencontré quelques soucis chez une majorité de constructeurs...
Ce filtre rencontre une efficacité plus ou moins grande en fonction des marques. Pour atteindre les 190°C demandés, il faut que le système chauffe. Et donc, à froid, l'élimination des NOx n'est nullement garantie. En plus, si vous utilisez un véhicule diesel en trajets urbains, le traitement sera incomplet. L'injection d'AdBlue est liée à l'injection de carburant. En français, plus on consomme de carburant, plus on consomme d'AdBlue. Mais, lorsque l'on alterne accélérations et arrêts, comme dans les bouchons, l'injection est déréglée, et une nouvelle source de panne se crée.
Il aura encore fallu compter sur le Groupe PSA (comme à l'époque de la création des filtres à particules) pour prouver que l'AdBlue est LA solution. L'AdBlue est en effet additivé, pour permettre une montée en température plus aisée. Ainsi, il est injecté directement à l'entrée du filtre SCR, placé entre le moteur et le filtre à particules classique. Les gaz arrivent encore chaud à l'entrée du gros filtre, et l'AdBlue se réchauffe directement. Il transformera donc les NOx en azote et eau dès le démarrage.
Le passage à la norme Euro 6c est actif depuis le mois de septembre 2018. Au départ, il ne visait qu'un passage (fort compliqué chez certains) aux normes WLTP, et une réduction des particules émises par les moteurs essence à injection directe. Mais, alors que la majorité des marques était "à la bourre" pour se mettre à la page, PSA (encore) a développé un nouveau moteur diesel, le fameux 1.5 BlueHDi. Il y a un changement fondamental au niveau du filtre SCR, qui est maintenant placé devant le moteur (augmentation de la chaleur) et en doublon. D'abord, le catalyseur stocke les NOx, puis le premier SCR (montant très vite en température) liquide 80% des oxydes d'azote, et le second SCR fait le reste, en prenant la fonction filtre à particules en même temps. On passe donc d'une élimination de 90% des NOx à 99%, pour répondre aux normes de 2020. Pour cela, il faut donc deux injections d'AdBlue, et une consommation plus élevée.
Beaucoup de personnes ont critiqué l'AdBlue, en disant que c'était un produit dangereux, extrêmement corrosif, toxique, etc. Il n'en est rien, enfin presque. Le seul point négatif de ce liquide est l'appoint. Cela dépend des modèles, mais il peut arriver que le bouchon de remplissage d'AdBlue soit terriblement inaccessible. Si vous ne retrouvez pas de bouchon bleu dans votre trappe à carburant, il faudra donc se référer au manuel. Leur emplacement peut migrer du capot moteur, jusqu'au coffre de votre voiture. La raison est toute simple : sur les premières générations de filtres SCR, la consommation d'AdBlue était de 1 litre par 1000 km. Soit, pour un réservoir entre 15 et 20 litres, cela équivalait à un remplissage tous les 17 000 km plus ou moins. Le garage s'occupe donc de ravitailler pour vous, et vous ne vous souciez pas du reste. Seulement, cette consommation varie avec celle du carburant, et les intervalles d'entretien dépasse allègrement les 20 000 km. Donc, vous êtes amenés à le faire vous-même ! Et, dans le coffre, c'est la catastrophe ! C'est pour cela que les nouveaux modèles diesels intègrent d'office un bouchon dans la trappe...
Sinon, il faut combattre les idées reçues.
De la Smart à la Bentayga, je peux dire que je suis complètement obsédé par le monde de l'automobile. Intégrer l'équipe de PDLV et pouvoir vous donner ma vision des nouveautés chaque jour est quelque chose de génial pour moi. Ma "carrière" de blogueur a débuté il y a quelques années, et ceci, cumulé à mes études en mécanique auto, me permettront de vous proposer un contenu de qualité, tout en gardant le côté décalé cher à PDLV. |
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Etienne Deketele-Kestens |